Argument proposé par Amîn HADJ-MOURI pour ses deux interventions (15/10 et 26/11) Séminaire Clinique de l’EPSM Lille-Métropole d’Armentières : « Qu’est-ce qu’une clinique sous transfert ? »
Si la clinique psychanalytique se distingue et se démarque radicalement des autres cliniques médico-psychologiques, c’est parce qu’elle est concernée au premier chef par la structure du sujet. Celle-ci est impliquée dans la construction et dans la résolution du symptôme, qui tente de la récuser au profit de vaines garanties ontologiques, soutenues et étayées par divers savoirs de toutes obédiences. Le symptôme justifie les demandes adressées aux représentants et détenteurs de ces savoirs, qui suscitent un amour d’autant plus fort qu’ils contribuent à refouler, voire à forclore le sujet, laissant accroire à une éradication du « défaut de rapport sexuel » (LACAN) qui lui est inhérent.
Cet amour privilégie le registre imaginaire (illusions ontologiques) pour faire échec à l’ordre symbolique (perte d’être et représentation) qui permet l’émergence d’une autre modalité de l’amour, celle qui subvertit progressivement -mais jamais définitivement-, grâce à la mise en évidence du réel, les illusions d’homéostasie affective et de comblement moïque. Cette dimension, inséparable des deux autres : l’imaginaire et le symbolique, retire à tout objet -surtout s’il est idéalisé- la prétention de venir à bout du désir en tant qu’il représente l’expression paradigmatique du manque et de l’incomplétude essentielle, indispensables à l’existence.
C’est ce trajet complexe, tortueux et tourmenté de l’amour qui caractérise le transfert et détermine les méandres d’une cure psychanalytique en tant qu’elle s’appuie sur lui comme une résistance ou un frein, qui s’avère cependant nécessaire à la mobilisation de l’inconscient et à sa reconnaissance comme une altérité indépassable. Cette altérité fonde la métapsychologie freudienne et ses développements lacaniens qui consacrent l’imprédicativité du discours analytique, et préservent ainsi son éthique des diverses dérives idéologiques qui menacent sa spécificité, tant théorique que pratique.
Grâce à « l’a-mur » (le mur de l’objet a renvoyant au « troumatisme »), le transfert se sustente de l’amour en tant qu’il « est le don de ce qu’on n’a pas » (LACAN). Quant à « l’amour-propre », comment l’aider, à partir de ses revendications mêmes, à se déprendre de sa « mâle-propreté » pour qu’il considère enfin la féminité comme inséparable de la paternité, caractérisée par le « Nom du Père » (LACAN) qui lui évite d’être amalgamée et/ou identifiée au patriarcat.